ACTES DES CONGRÈS

32èmes Journées Nationales de Santé au Travail dans le BTP LILLE 2013

Séance inaugurale

Exposé du Pr Pierre-Yves VERKINDT

Responsabilités sur les chantiers BTP

Mercredi 29 mai 2013 – 8H30 – 10H00

Présidence de Séance :
Paul FRIMAT, PU/PH, CHRU Université Lille 2, GERDA
Claudie LEBAUPAIN, Médecin du Travail, APST BTP RP

Le film
Réalisation : Francis MATHA, Mireille LOIZEAU, Jean-Pierre BAUD, Dominique LEUXE 

Introduction - Des chiffres, des données

Données épidémiologiques et apports de l'Enquête nationale 2012 – 2013

Paul FRIMAT, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, CHRU-Université Lille 2, GERDA

Cette enquête nationale a été menée entre mars 2012 et mars 2013. Elle a permis de recueillir 1 566 questionnaires « salariés » (renseignés par les médecins du travail volontaires) et 1 239 questionnaires « chantier » (renseignés par les préventeurs réalisant des visites de chantiers).

La prévalence des dermatoses cutanées des mains dans l’échantillon est de 12,7%. Elle atteint 18% chez les maçons, 16,4% chez les ouvriers zingueurs, 9% chez les menuisiers et 6,4% chez les peintres. L’index et le pouce sont les localisations les plus fréquentes et l’atteinte prédomine à droite. La prévalence augmente avec l’ancienneté dans le métier (variant de 10,2 à 18%).

Les chantiers disposent pour la plupart d’un cantonnement et de moyens d’hygiène.
Gants et vêtements de protection en bon état sont mis à disposition des salariés respectivement dans 81% et 87,3% des cas.

Les conséquences humaines et professionnelles des dermatoses sont lourdes (16,1% des sujets atteints ont eu besoin d’un traitement, 4% ont eu un arrêt-maladie, 2% ont été déclarés en maladie professionnelle, 4% ont nécessité un reclassement et 1,5% ont été déclarés inaptes). Les causes principales de ces dermatoses étant la protection inadaptée, les conditions climatiques (travail en milieu humide), l’utilisation de produits irritants (ciment particulièrement), les traumatismes ; il convient de favoriser la prévention collective, complétée par le port des équipements de protection individuelle (bien que ceux-ci puissent être à leur tour, source de pathologies). L’hygiène cutanée est primordiale, complétée par l’utilisation de crèmes avant ou après le travail.

Dermatoses professionnelles dans le BTP - Données issues du RNV3P (Réseau National de Vigilance et de Prévention des Pathologies Professionnelles)

Linda BENSEFA, Praticien Hospitalier, Service de Pathologie Professionnelle, AP-HP Hôpital Cochin, Paris

Bien que les dermatoses professionnelles soient une des principales causes de maladie professionnelle en Europe, leurs tendances sont peu documentées. Le Réseau National de Vigilance et de Prévention des Pathologies Professionnelles (RNV3P) recense le suivi des problèmes de santé liés au travail (PST) sur l’ensemble du territoire, en centralisant les informations recueillies dans chacun de ses 32 centres de consultations de pathologies professionnelles (CCPP) et de 10 services de Santé au Travail (SST), au sein d’une base de données nationale. Il s’agit du seul réseau de suivi sanitaire spécifique aux pathologies professionnelles.

La population étudiée concerne les années 2001 à 2010.
127 685 PST ont été enregistrés dont 69 779 pathologies en relation avec le travail. 7 782 PST sont retrouvés dans le secteur de la construction. Les maladies de peau signalées sont 346 dermatites allergiques de contact (DAC), 104 dermatites d’irritation, 8 urticaires de contact.

Concernant les DAC, les maçons sont les plus concernés (lien avec le ciment et le chrome hexavalent), suivis par les poseurs de revêtements de sol et les carreleurs (lien avec les résines époxy le chrome, les colles, les caoutchoucs, les biocides), les peintres et les poseurs de papier peint (résines époxy, peintures, colles).Il est noté une tendance à la hausse des DAC (dermatites allergiques de contact) dans le BTP entre 2001 et 2010, significative pour les résines époxy (en lien avec les durcisseurs) et une tendance à la baisse des DAC pour le ciment (diminution de sa concentration en chrome hexavalent).

Pour les dermatites irritatives, il n’existe pas de tendance claire. Celles liées au ciment tendraient à la hausse mais les résultats sont non significatifs (en lien avec le ciment humide alcalin, le nickel, le cobalt ou d’autres substances sensibilisantes ou le mélange sable-ciment très abrasif).
Elles surviennent à un âge moyen de 36,5 ans et concernent essentiellement les maçons, les peintres en bâtiments, les poseurs de revêtements de sols. Les nuisances sont essentiellement le ciment, et à un moindre degré, les solvants, les diluants et les métaux.

Les urticaires de contact sont trop peu nombreux pour qu’une tendance puisse se dégager.

Baromètre Hygiène OPPBTP 2013

Jean-Pierre BAUD - Médecin Conseil OPPBTP, Lyon

Bien que les dermatoses professionnelles soient une des principales causes de maladie professionnelle en Europe, leurs tendances sont peu documentées. Le Réseau National de Vigilance et de Prévention des Pathologies Professionnelles (RNV3P) recense le suivi des problèmes de santé liés au travail (PST) sur l’ensemble du territoire, en centralisant les informations recueillies dans chacun de ses 32 centres de consultations de pathologies professionnelles (CCPP) et de 10 services de Santé au Travail (SST), au sein d’une base de données nationale. Il s’agit du seul réseau de suivi sanitaire spécifique aux pathologies professionnelles.

La population étudiée concerne les années 2001 à 2010.
127 685 PST ont été enregistrés dont 69 779 pathologies en relation avec le travail. 7 782 PST sont retrouvés dans le secteur de la construction. Les maladies de peau signalées sont 346 dermatites allergiques de contact (DAC), 104 dermatites d’irritation, 8 urticaires de contact.

Concernant les DAC, les maçons sont les plus concernés (lien avec le ciment et le chrome hexavalent), suivis par les poseurs de revêtements de sol et les carreleurs (lien avec les résines époxy le chrome, les colles, les caoutchoucs, les biocides), les peintres et les poseurs de papier peint (résines époxy, peintures, colles).Il est noté une tendance à la hausse des DAC (dermatites allergiques de contact) dans le BTP entre 2001 et 2010, significative pour les résines époxy (en lien avec les durcisseurs) et une tendance à la baisse des DAC pour le ciment (diminution de sa concentration en chrome hexavalent).

Pour les dermatites irritatives, il n’existe pas de tendance claire. Celles liées au ciment tendraient à la hausse mais les résultats sont non significatifs (en lien avec le ciment humide alcalin, le nickel, le cobalt ou d’autres substances sensibilisantes ou le mélange sable-ciment très abrasif).
Elles surviennent à un âge moyen de 36,5 ans et concernent essentiellement les maçons, les peintres en bâtiments, les poseurs de revêtements de sols. Les nuisances sont essentiellement le ciment, et à un moindre degré, les solvants, les diluants et les métaux.

Les urticaires de contact sont trop peu nombreux pour qu’une tendance puisse se dégager.

10h30 – 12h30

Présidence de Séance :
Gilbert JELEN, Dermatologue, GERDA
Marie-Bernadette CLEENEWERCK, Dermatologue, Médecin du travail, Pôle Santé Travail, Lille GERDA 

Approche physiopathologique des fonctions barrières

Peau et immunologie

Jean-Pierre BAUD - Médecin Conseil OPPBTP, Lyon

La peau a une fonction barrière principalement dévolue à l’épiderme et à la couche cornée.L’utilisation d’émollients est nécessaire au maintien d’une bonne fonction barrière qui préviendra la survenue des eczémas (sans que les « crèmes barrières » ne puissent remplacer une bonne fonction barrière cutanée).
L’altération de la fonction barrière favorise la sensibilisation vis-à-vis des molécules en contact avec la peau. En effet, l’application sur la peau de produits toxiques chimiques induit une activation des cellules de l’immunité cutanée innée ; il en résulte nécrose, apoptose, activation cellulaire, libération de cytokines et de chimiokines qui conduisent à un infiltrat inflammatoire à l’origine des dermatites irritatives (DIC).
Les dermatites allergiques de contact (DAC) correspondent à une réponse immunitaire adaptative de type hypersensibilité retardée conduisant à une inflammation secondaire à l’activation dans la peau de lymphocytes CD8 +.

Bien que la physiopathologie des DIC et des DAC soit différente, la fréquence et la sévérité des DAC est directement corrélée à la capacité d’un produit chimique à induire une irritation cutanée.
Les patients porteurs de DIC se sensibilisant plus fréquemment et plus rapidement que les sujets sans DIC, la prévention des DAC passe par la lutte contre l’irritation cutanée qui fait le lit de l’allergie. 

Risques et bénéfices de l'exposition au soleil dans le BTP

Pierre THOMAS, Professeur de Dermatologie, Université Lille 2, Consultant au CHRU Lille

Le rayonnement solaire est fait à la fois de rayons UVB (85%) et de rayons UVA (15%).
Tous deux entraînent mutations, apoptose immédiate ou retardée et érythèmes (mélanisation UVA et mélanogénèse UVB), excès de radicaux libres, lésions directes et indirectes de l’ADN.

Effets nocifs du soleil

Le coup de soleil revêt des degrés divers selon le phototype, l’index UV et la durée d’exposition.
Les UVA produisent une pigmentation immédiate transitoire qui ne protège pas contre les UVB.

Le soleil est aussi responsable de lésions ophtalmologiques : ophtalmie des neiges, cataracte, voire DMLA (rôle de la lumière bleue ?)

La prévention passe par l’auto-évaluation du risque. Il faut tenir compte de l’ensoleillement (index UV coté de 1 à 10) et de la carnation (blanche : phototype I, claire : phototype II, mate : phototype III). Le croisement de ces deux paramètres permet de choisir le niveau de protection (voir échelle de risque de Thomas).

Le coup de chaleur est un véritable problème pour les travailleurs du BTP. Il est une conséquence d’une perturbation de la thermorégulation liée à une hydratation insuffisante et une hygrométrie excessive. Les symptômes sont une température excédant 40°C, une peau brûlante, des muqueuse sèches, des nausées et vomissements, des crampes, des troubles du comportement et une hypotension. Il s’agit d’une urgence vitale.

Les cancers cutanés Les UV solaires et artificiels sont reconnus carcinogènes de classe 1. Les données épidémiologiques font état d’une relation inverse avec la latitude pour les carcinomes et mélanomes.

Les carcinomes basocellulaires surviennent préférentiellement sur les zones découvertes chez les sujets à phototype clair (fréquence : 120/100 0000 habitants). Ils sont en lien avec des UV délivrés à fortes doses mais de manière intermittente (reflétées par les coups de soleil). La production de mélanine est faible de même que la capacité de réparation.
Les carcinomes épidermoïdes sont liés à des expositions chroniques professionnelles et récréatives (UV à faibles doses mais répétées). Ils surviennent surtout chez les sujets âgés de phototype clair sur une lésion préexistante. Les kératinocytes accumulent les mutations et prolifèrent. Ils ont un important potentiel métastatique. Le risque est majeur chez les immunodéprimés (greffés d’organes). Fréquence 20/100 000 habitants.
Quant au mélanome (le plus grave des cancers cutanés), il existe un bon moyen mnémotechnique pour se souvenir de ses caractéristiques : les lettres A,B, C, D et E ; A pour asymétrie, B pour bords irréguliers, C pour couleur inhomogène, D pour diamètre supérieur à 6 mm et E pour extension. Plus la couleur est noire, plus la lésion est profonde. Fréquence 10 /100 0000 habitants. Il est en lien avec les UV à fortes doses mais intermittentes et concerne les sujets s’exposant de courtes durées mais de façon importante et utilisant des produits antisolaires (qui ne protègent pas contre les UVA).
Dans le BTP, l’exposition chronique au soleil potentialise le risque carcinogène propre des hydrocarbures polycycliques aromatiques (HPA) et réciproquement.

Les ouvriers du BTP en contact avec le goudron, le brai, le bitume, l’asphalte, le créosote lors de l’entretien des routes ou des voies ferrées bénéficient de la reconnaissance en maladie professionnelle au titre du tableau n° 16 du Régime Général.

Le rôle du soleil est difficile à déterminer. Aussi le cancérogène chimique plus facile à identifier est déterminant pour la reconnaissance.

Effets bénéfiques du soleil
Essentiellement, la synthèse de la vitamine D dont on a vanté les mérites dans la prévention de certains cancers (colo-rectal), de maladies cardiovasculaires, métaboliques et dysimmunitaires. Néanmoins, ¾ des sujets apparemment sains ont un taux sérique bas.
La vitamine D est synthétisée par les rayons solaires (UVB) mais est présente dans les poissons gras, le jaune d’œuf, les végétaux. Elle est stockée dans la graisse et le muscle. Son dosage est difficile et la majorité des examens sont faits en routine par des techniques automatisées peu sensibles et peu reproductibles. Différentes études ont montré que le taux de vitamine D était réduit de 8% chez les travailleuses de nuit et qu’il était augmenté de 5% chez les hommes et les femmes qui travaillaient moins de 35 h par rapport à ceux et celles qui travaillaient entre 35 et 40 heures par semaine. Mais le facteur confondant majeur est l’obésité et les sujets en surpoids ont des taux bas du fait du stockage de cette vitamine liposoluble dans le tissu graisseux.
De fait, l’engouement actuel pour les supplémentations en vitamine D doit être sérieusement tempéré.

Prévention des effets solaires nocifs

Collective :

organisation des horaires de travail : commencer tôt, arrêter au midi solaire (en ignorant l’heure d’été),
organisation des conditions de travail : prévoir des coupures, favoriser la rotation des postes, installer des zones d’ombre,
organisation des postes : affecter aux postes à risque, en tenant compte des phototypes.
Individuelle :

protection vestimentaire : chapeau à larges bords (7, 5 cm), gants, parasol, tee-shirts sombres ou clairs, à manches longues, à maille serrée, portés lâches et secs (car mouillés il sont transparents aux UV), comportant éventuellement des filtres solaires incorporés, pantalon de toile,
protection par antisolaires protégeant contre UVB et UVA,
protection oculaire : Si pour les emmétropes, des lunettes solaires plastique bas de gamme suffisent, les amétropes porteront uniquement des verres organiques CR 39 ou en polycarbonate arrêtant UVB et UVA et plus ou moins photochromiques (pas de verres minéraux teintés perméables aux UVA et pas de verres polarisants laissant passer le rayonnement direct).

Les voies de passage à travers la peau - à propos des nano-matériaux

Christine LAFFORGUE, MCF, Dermo-pharmacologie, Université Paris Sud 11, GERDA

L’excipient traverse la couche cornée de la peau, constituée d’une alternance de cellules et de lipides plongés dans un mortier fait en majorité de protéines (75-80%) et de lipides (5-15%). Ce stratum corneum est une membrane lipophile et l’organisation et la structure des lipides jouent un rôle clé dans la diffusion du produit. Une fois la couche cornée atteinte, la molécule doit se partager entre le stratum corneum lipophile et l’épiderme vivant hydrophile. Après solubilisation, la molécule peut être éliminée par le système sanguin ou atteindre les tissus cibles et produire des effets. La pénétration peut être intercellulaire, intracellulaire mais pour les nanomatériaux, elle se fait essentiellement par le follicule pileux, car la couche cornée y est à cet endroit peu profonde.
Mais la peau n’est pas simplement une barrière passive qui s’oppose à la diffusion des xénobiotiques ; c’est aussi un organe métaboliquement actif qui transforme les substances durant leur diffusion avant qu’elles n’atteignent la circulation systémique (enzymes de la couche cornée, enzymes épidermiques, enzymes dermiques et enzymes de la flore bactérienne de surface). Et ces nouvelles molécules ont des propriétés différentes de la molécule « nue ».
Peu d’études ont encore été réalisées sur la pénétration des nanomatériaux à travers la peau. Il semble que la pénétration soit très faible sur une peau intacte. Les phénomènes sont différents sur une peau endommagée. Il semble au premier abord que le risque des nanoparticules soit plutôt en lien avec une pénétration respiratoire. 

Peau et agressions par les arthropodes dans le BTP

Catherine PECQUET, Praticien Hospitalier, Dermato-Allergologie, Hôpital Tenon, HUEP, AP-HP Paris GERDA

De nombreux arthropodes (« venimeux » non hématophages et hématophages) sont susceptibles d’entraîner nuisances et transmissions d’agents infectieux.

Les arthropodes « venimeux » non hématophages (guêpes, abeilles, frelons, fourmis, araignées, mille-pattes…) entraînent des réactions inflammatoires locales plus ou moins nécrotiques, locorégionales, des envenimations et des réactions allergiques. Les douleurs peuvent être importantes.

Conduite à tenir :

En cas de piqûre d’hyménoptère, l’important est de rassurer et d’identifier l’insecte : présence ou non d’un dard qu’il faut extraire rapidement. Dermocorticoïdes et antihistaminiques sont conseillés. En cas de choc anaphylactique, injecter adrénaline et faire appel aux services d’urgence. Toute réaction allergique (urticaire ou choc) fera l’objet d’un bilan allergologique pour envisager une éventuelle désensibilisation.

En cas de piqûre de scorpion (zone méditerranéenne) qui entraîne une réaction locale douloureuse, œdémateuse parfois bulleuse, mais risque rare d’envenimation, il est important de rassurer, d’immobiliser, d’appliquer de la glace et de faire appel au centre antipoison régional (l’identification du scorpion est essentielle en cas d’envenimation car son traitement en dépend).

Les arthropodes hématophages non venimeux (insectes, acariens) sont responsables de lésions papuleuses prurigineuses au point de ponction (très discrètes ou au contraire très inflammatoires). Les lésions sont fonction des pièces buccales : soit de type piqueur-suceur avec une ponction capillaire directe (moustiques et punaises), soit des mandibules qui dilacèrent les tissus, soit un système permettant une fixation de longue durée (tiques).
Les salives peuvent avoir des propriétés anesthésiantes, anticoagulantes et urticantes.

Conduite à tenir : Traitement symptomatique, identification de l’arthropode pour évaluer le risque de transmission vectorielle. 

14 h 00 – 16 h 00

Présidence de Séance :
Marie-Noëlle CREPY, Dermatologue, Médecin du Travail, Hop.Cochin,GERDA
Jean-Pierre BAUD, Médecin du Travail BTP ST, Médecin Conseil OPPBTP

Aspects cliniques

La main du travailleur BTP - Aspects cliniques

Marie-Bernadette CLEENEWERCK, Dermatologue, Médecin du travail, Pôle Santé Travail, Lille, GERDA

Pathologie liée au ciment
Dans les dermatoses du travailleur du BTP, le ciment reste toujours d’actualité, responsable de brûlures : « cement burns » ulcérations plus ou moins profondes à l’emporte-pièce, uniques ou multiples, nécrotiques et évolutives siégeant le plus souvent aux doigts mais aussi aux avant-bras, genoux, jambes, chevilles, à la faveur d‘une position agenouillée dans le ciment frais, ou du port de vêtements souillés par le ciment ou de coulées de ciment à l’intérieur des bottes.
Ces brûlures souvent asymptotiques dans les premières heures peuvent se compliquer de surinfections ou évoluer vers des escarres nécessitant le débridement, voire un traitement chirurgical avec greffe de peau.
Cette pathologie se voit essentiellement chez les sujets insuffisamment informés du risque (apprentis oui intérimaires) ou les personnes négligentes.

Les formes chroniques sont des pulpites d’usure, desquamatives avec aspect émoussé ou disparition des empreintes digitales, des lésions nummulaires ou des onychodystrophies séquellaires des doigts. Ces formes chroniques sont la résultante de facteurs climatiques, de microtraumatismes lors de la manutention, du lavage des mains avec des produits inadaptés.

Les eczémas de contact allergiques sont des eczémas de contact aigus, vésiculo-suintants ou chroniques, plutôt secs, kératosiques et fissurés, siégeant sur la face dorsale des mains mais pouvant s’étendre aux poignets, aux avant-bras voire au visage, et dus à une sensibilisation cutanée aux chromes hexavalents des ciments ou au cobalt. S’y ajoutent les dermatites de contact aéroportées (par les poussières de ciment dans l’environnement de travail).

D’autres dermatoses ont été décrites :

– des réactions de photosensibilisation cutanée de contact au cobalt et au chrome hexavalent, aux bitumes et goudrons, sur les zones découvertes,
– des allergies de contact aux produits manipulés, aux composants des gants, aux produits de lavage, aux crèmes de protection des mains,
– des onychopathies en lien avec des produits alcalins ou acides, des solvants, des détergents…,
– des kératoses actiniques en lien avec les expositions chroniques aux UV solaires lors du travail en extérieur 

Le Pied du travailleur BTP

Gilbert JELEN, Dermatologue (Saverne - 67),  GERDA

Les dermatoses professionnelles siégeant aux pieds relèvent de causes multiples (mécaniques, chimiques, électriques, thermiques, biologiques, rayonnements).
Les risques spécifiques de cette catégorie de travailleurs sont les risques traumatiques, les brûlures par les ciments à prise rapide, les allergies par le chrome du ciment.
Le pied est soumis à des irritations chroniques.
Le froid produit des engelures en hiver.
La chaleur et la macération entraînent hyperhydrose, kératose ponctuée… dermatite d’irritation qui peut se compliquer de surinfection mycosique ou microbienne.
La dyshydrose est d’étiologie multifactorielle (facteurs endogènes et exogènes) et est aggravée par le café, l’alcool, le tabac et l’atopie.

Les équipements de protection individuelle (EPI) peuvent être responsables d’eczéma siégeant sur le dos des pieds et des orteils, de manière bilatérale. La saison chaude favorise une pénétration des allergènes et le déclenchement de la dermatite. Une allergie spécifique aux chaussures de sécurité peut être liée au cuir (en raison du chrome ou des biocides dont l’isothiazolinone), aux résines formaldéhyde, aux colorants, au caoutchouc, aux matières plastiques, aux doublures non tissées, aux biocides, aux colles… , aux embouts métalliques.
Les chaussettes peuvent être en cause du fait de leurs composants (colorants azoïques) ou de leur composition (laine irritante).

Bien que les EPI puissent être impliqués dans la pathologie du pied du travailleur du BTP, le risque d’intolérance est faible et les chaussures de sécurité gardent toute leur utilité ; leur choix mérite si nécessaire, que soient prises en compte les spécificités et les allergies de chacun. 

Les cas difficiles car trompeurs

Dominique TENNSTEDT, Professeur Chef de service Dermatologie, Cliniques universitaires St Luc, UCL, Bruxelles, GERDA

COMMUNICATIONS

Chantier de Restauration du Beffroi de la Cathédrale d'Orléans : les mains des salariés, principal vecteur de contamination au plomb

Boris MARC - SAN.T.BTP - Blois

L’augmentation des plombémies de deux salariés travaillant à la restauration du beffroi d’Orléans (pour lequel ils réalisaient des abat-sons constitués d’un panneau de bois recouvert de plomb neuf) a attiré l’attention du médecin du travail.
Un IPRP chimiste du service a été diligenté pour faire le point sur la réalité des conditions de travail. Il est apparu que les vêtements de travail étaient en contact avec le plomb et que la manipulation des tables de plomb se faisait parfois à mains nues (des gants étaient néanmoins à disposition) et que le personnel prenait ses repas dans un brasserie voisine sans quitter ses vêtements de travail et qui plus est, l’un des deux fumait sur le chantier.
Les métrologies réalisées ont montré que les mains étaient contaminées par le plomb et que des poussières de plomb étaient transportées dans le véhicule (volant et assise contaminés) via les vêtements de travail et les mains.
Information et sensibilisation de l’employeur et des salariés ont été rapidement effectuées. 

Un cancérogène néoformé dans un produit apparemment banal

Emmanuelle DUPUIS - Pôle Santé Travail Métropole Nord – Lille

L’analyse des fiches de données de sécurité a permis de faire le point sur un lubrifiant glisse-fil, utilisé pour faciliter le passage des fils et câbles dans les gaines.
La fiche mentionnait morpholine (amine secondaire) et nitrite de sodium (agent nitrosant) sans étiquetage particulier quant à un éventuel effet mutagène ou toxique pour la reproduction. Mais médecins du travail et IPRP en toxicologie industrielle ont tout de suite compris que l’association de ces deux produits en solution engendrait l’apparition de N-Nitrosomorpholine (une nitrosamine), pouvant être cancérogène pour l’homme. Une confirmation a été demandée au laboratoire de Chimie analytique de l’INRS qui a confirmé la présence de ce produit en forte concentration dans le liquide. Les nitrosamines sont de puissants cancérogènes responsables chez l’homme de cancers de la vessie et probablement d’autres organes. Une alerte a été faite à l’employeur qui a retiré immédiatement le produit et fait appel à des produits de substitution. Un produit apparemment banal peut donc être cancérogène. 

Substitution de l'acide borique par le sulfate d'ammonium dans la ouate de cellulose à visée thermique : cas de plusieurs intoxications professionnelles à l'ammoniac dans une entreprise d'isolation de combles

Virginie DIEU - Pôle Santé Travail Métropole Nord - Lille

16h30 – 18h30 Symposium « Addictions et travail « 

Quiz Addictions "Pour s'échauffer..."

Dr S. FANTONI-QUINTON, PUPH Lille

" Alcool – Drogues et Travail " Le positionnement commun des SST-BTP

Dr E. Rebeschini, Médecin du Travail – AST BTP 13, Dr F. Arque, Médecin du Travail – SRAS

Addictologie clinique en Santé au Travail - Les questions des employeurs aux médecins du travail

Dr .Damien DUQUESNE, P.H. au C.H. d’ARRAS - CSAPA - Médecin au pôle santé travail de LILLE

Addictologie - Outils pratiques en Service de Santé au travail : ateliers d'addictologie, boîte à outils

Dr R. COENT, Dr A. COLLIN, Mme A. MEUNEVEAUX, SSTBTP21

Bonnes pratiques en entreprise

L’entreprise face à ces pratiques
Christian GONNET

Ecriture des Règlements Intérieurs

Joséphine QUANDALLE-BERNARD - Avocat à la cour

Jeudi 30 mai 8h30 – 10h00

Présidence de Séance :
Dominique LEUXE, Directrice médicale APST BTP RP, Médecin conseil national OPPBTP
Catherine NISSE, Médecin du Travail, Toxicologue, MCU PH, CHRU Université Lille 2 

Conférences d’actualités

Cancers cutanés : place de la prévention en milieu de travail
Isabelle TORDJMAN, Adjointe au Chef de service Inspection Médicale, Direction Générale du Travail, Paris

800 000 cancers cutanés surviennent chaque année.Selon l’enquête SUMER 2010, 61% des salariés dans le secteur construction sont exposés à au moins un agent chimique, 29% sont multi-exposés et 32% sont exposés à des agents chimiques cancérogènes (UV naturels et artificiels, rayonnements ionisants, hydrocarbures polycycliques aromatiques : HAP, arsenic).
Il existe des synergies entre certains facteurs de risque (HAP et UV, Rayonnements ionisants et UV). Les cicatrices de brûlures sont des cofacteurs reconnus.

La réforme de la médecine du travail a défini des axes d’action et des leviers d’intervention pour accentuer la prévention sur le lieu de travail.

Pour l’employeur : évaluation des risques (prise en compte de la dangerosité des agents, des circonstances d’exposition), actions de prévention (information et formation des salariés, mise en place d’une organisation et de moyens adaptés).
Pour le service de santé au travail :
actions en milieu de travail menées par le médecin du travail et l’équipe pluridisciplinaire : analyse des facteurs de risques, fiche d’entreprise, conseils aux employeurs et aux salariés,
traçabilité des expositions (du fait des risques différés),
suivi individuel des salariés.
Le suivi individuel se fait dans le cadre de la visite médicale ou de l’entretien infirmier (information des salariés, adaptation du poste de travail, sensibilisation aux moyens de prévention et adaptation en fonction des facteurs de risques individuels). La Haute Autorité de Santé (HAS) recommande notamment dans sa stratégie de détection précoce du mélanome (juillet 2012) :

– d’examiner ou de faire examiner le revêtement cutané des sujets à haut risque individuel tous les 6 mois,
– de former les professionnels de santé au diagnostic précoce et à la sémiologie des mélanomes cutanés mais aussi à l’identification des patients à risque,
– de sensibiliser la population générale au diagnostic précoce en l’informant sur les risques liés à l’exposition solaire et sur les facteurs de risque de mélanome cutané. 

Le phénomène de Raynaud professionnel

Pierre-Yves HATRON, Professeur des Universités, Praticien hospitalier, Service de Médecine Interne, CHRU-Université Lille 2

La prévention repose sur l’usage d’outils à faible niveau de vibrations, la limitation de la durée d’exposition, le port de gants, l’arrêt du tabac, la surveillance médicale et la réorientation du patient dès les premiers stades de la maladie. Le syndrome du marteau hypothénar survient chez les travailleurs qui utilisent l’éminence hypothénar comme outil de percussion direct ou indirect. Ces traumatismes répétés, ou plus exceptionnellement un traumatisme unique et violent, lèsent l’artère ulnaire en aval du canal de Guyon alors qu’elle est en contact avec l’os crochu. Survient un anévrysme, qui se thrombose et envoie des embols au niveau des artères digitales.
On retrouve des signes d’ischémie dans 95% des cas évoluant près d’une fois sur deux vers la gangrène ou une nécrose digitale d’un ou plusieurs des quatre derniers doigts. Les causes professionnelles représentent la 3e cause de nécrose digitale.
Le diagnostic est confirmé par l’imagerie qui montre cet anévrisme ou la thrombose de l’artère ulnaire et de multiples occlusions des artères digitales.
Le traitement médical est souvent suffisant : arrêt de l’exposition et du tabac, drogues vasoactives, antiagrégants.
Le traitement chirurgical est discuté.
Les rechutes sont possibles si l’exclusion au risque n’est pas totale et si la consommation de tabac perdure.
Le phénomène de Raynaud peut être la première manifestation d’une sclérodermie induite par la silice (syndrome d’Erasmus) ou les solvants organiques (hydrocarbures aromatiques, hydrocarbures chlorés).

Psoriasis et travail dans le BTP

Emmanuel DELAPORTE, Professeur des Universités, Praticien hospitalier, Service de Dermatologie, CHRU-Université Lille 2

Le psoriasis est une maladie inflammatoire à médiation immune d’évolution chronique faite d’une alternance de poussées et de rémissions spontanées. Elle est liée à la génétique, à des perturbations du système immunitaire et des facteurs environnementaux (médicaments, virus et bactéries, stress). Le rhumatisme psoriasique est associé dans 20 à 25% des cas ; il doit être recherché systématiquement et sur le long terme car il doit être traité le plus tôt possible afin d’éviter une ankylose articulaire définitive.
Le psoriasis est une maladie de système et de nombreuses morbidités sont à rechercher afin de les intégrer dans la prise en charge globale (syndrome métabolique, diabète : 4 fois plus fréquent en cas de psoriasis, dépression, idées suicidaires, anxiété, addictions alcool ou tabac, maladie inflammatoire chronique intestinale).
La sévérité du psoriasis sera évaluée en tenant compte des paramètres professionnels : atteinte cutanée, prurit, douleurs, retentissement sur la qualité de vie, localisation des lésions (visage, cuir chevelu… ), âge, sexe, profession, milieu socio-culturel, historique clinique et thérapeutique.

Les cas légers (80% des cas) bénéficieront de traitements topiques : dermocorticoïdes, associés ou non à des analogues de la vitamine D.
Les cas modérés à sévères recevront des traitements systémiques (biomédicaments : anti TNF α, anti IL12/23).
Les cas très sévères bénéficieront d’une hospitalisation : soins locaux intensifs, consultations d’addictologie, de nutrition, de diabétologie, de psychiatrie, de rhumatologie, de stomatologie, etc… et de séances d’éducation thérapeutique.

Il faut persuader le patient que cette maladie ne persiste pas toute la vie si elle est bien prise en charge (l’observance des traitements est essentielle). 

10h30 – 12h30

Présidence de Séance :
Jeanne-Marie BRILLET, MIRT, DIRECCTE Nord – Pas de Calais
Gérard ARASZKIEWIRZ, Médecin du Travail, SMIBTP, GNMST BTP

Education et prévention

Gants et crèmes de protection, quelle efficacité ?

Marie-Noëlle CREPY, Dermatologue, Médecin du travail, Hôpital Cochin, Paris, GERDA

Education pour la santé et ordonnances de prévention concernant les dermatoses professionnelles

Christian GERAUT, Professeur des Universités, Praticien hospitalier, Dermato-vénéréologiste, CHU Nantes, Membre de l'Académie de Médecine, GERDA

Il faut recommander chaque fois que possible, les mesures de prévention collective

– diminuer la teneur en chrome hexavalent des ciments,
– utiliser des chélateurs (sulfate de fer transformant le chrome hexavalent en chrome trivalent peu sensibilisant, pour une durée limitée).
– essayer de substituer les multiples allergènes que sont le nickel (dans les outils en métal et la robinetterie), la colophane (très utilisée pour ses propriétés collantes et émulsifiantes, et rajoutée à l’asphalte en vue d’augmenter sa résistance), les résines époxy, acryliques, phénoplastes, etc.. ;

Une dermatose constituée impose un traitement efficace et si une cause précise a été identifiée, une éviction totale de l’agent causal.

Mais comme pour les accidents de travail, il existe rarement une cause unique. Il faut donc prendre en compte le caractère multifactoriel :

– tous les facteurs d’agression cutanée (allergènes, irritants, sudation….),
– tous les gestes professionnels néfastes (s’agenouiller dans du ciment frais, lisser le ciment avec les doigts),
– les méthodes de lavage des mains (utilisation de diluants ou lavage des mains dans un seau),
– le stress qui majore les risques et l’importance des lésions.
– Le port d’équipements de protection individuelle : les gants de protection et l’utilisation de crèmes de protection sont des mesures recommandées dans la prévention des dermatites de contact professionnelles.

Quels gants porter ? Les gants représentent un premier rempart contre les produits manipulés dans le BTP. Ils seront en premier lieu adaptés : en fonction de la famille chimique du produit manipulé, du temps de contact, de la dextérité nécessaire et des autres risques associés. Il est important de tenir compte de l’indice de pénétration (qui correspond au passage des produits chimiques à travers les imperfections du gant) et du temps de perméation (qui correspond à la diffusion des produits chimiques à travers le matériau du gant à l’échelon moléculaire et qui est mesuré par le temps de passage d’un produit chimique, de la face externe à la face interne du gant mais les résultats sont à interpréter avec prudence car ne correspondant pas souvent aux réelles conditions de travail).

Dans le secteur de la construction, le ciment humide reste la nuisance la plus fréquente.
Les gants en textile ou cuir sont déconseillés et il faut utiliser préférentiellement des gants en nitrile doublés coton.
Les résines époxy (de plus en plus souvent incriminées comme allergènes dans ce secteur professionnel) nécessitent pour leur manipulation, des gants à longues manchettes en nitrile, néoprène ou butyle et des sous gants en coton. Le mieux est un usage unique et à défaut, un changement très fréquent.
Attention aux gants en latex bon marché chargés de thiurames (additifs de vulcanisation).

Les peintres sont soumis à de multiples irritants (solvants, diluants), allergènes (biocides, époxy). On note une augmentation de la MCI/MI (méthylchloroisothiazolinone et méthylisothiazolinone), du formaldéhyde et de nombreux allergènes cutanés.

Pour choisir le gant le mieux adapté, l’INRS propose le logiciel ProtectPo qui permet d’effectuer des recherches par : solvant ou mélange de solvants permettant d’obtenir une liste de matériaux recommandés, famille de solvants permettant d’obtenir des résultats quant au niveau de compatibilité entre les solvants de la famille sélectionnée et les matériaux, matériau polymère permettant de choisir parmi les cinq matériaux répertoriés (butyle, Viton®, latex, Néoprène® et nitrile).

Les gants seront confortables et correctement portés. Pas de gants usés, troués ou abîmés, pas de manchettes trop courtes, pas de durée de contact trop longue.Les gants contaminés sont dangereux apportant un faux sentiment de sécurité.

Mais les EPI n’ont pas que des avantages :

La sudation qu’ils entraînent favorise certaines lésions (ne pas les porter trop longtemps, porter des sous-gants en coton, changer de chaussettes régulièrement).
Des allergies sont possibles au caoutchouc, au chrome contenu dans le cuir, ou aux conservateurs des gants, chaussures de sécurité et bottes (diméthylfumarate, dibromodicyanobutane, Kathon, méthylisothiazolinone).

Crèmes barrière et/ou émollients ?

Les crèmes barrière
Ce sont des préparations topiques appliquées sur la peau propre et saine avant le travail et destinées à diminuer les effets du contact cutané avec les différents contaminants, mais elles couvrent rarement la totalité des parties à protéger.

Leur efficacité est controversée et elles peuvent donner une fausse impression de sécurité, évitant de ce fait, l’utilisation d’autres mesures préventives plus efficaces. Il n’ y a donc pas lieu de promouvoir leur utilisation dans la prévention primaire. De même dans la prise en charge de la dermatite de contact, elles n’améliorent pas l’état cutané.

Les crèmes émollientes
Il s’agit de préparations topiques destinées à augmenter l’hydratation des couches les plus superficielles de la peau en réduisant la perte d’eau. Il est recommandé de les utiliser après le travail et régulièrement pendant le travail après le lavage des mains. Leur capacité de régénération de la barrière cutanée est reconnue.Ces crèmes sont recommandées dans la prévention primaire en cas de dermatite.

Les ordonnances de prévention
Toutes les informations orales données au salarié seront regroupées dans des ordonnances de prévention qui lui seront transmises par écrit, et qui seront rédigées en sa présence moyennant des explications claires.
Elles seront complétées par des visites répétées sur les lieux de travail afin de vérifier leur faisabilité, et leur réalisation effective.

Elles préciseront :

– comment se laver les mains contaminées sur le lieu de travail avec des savons efficaces mais non agressifs, et des savons surgras à domicile sans parfums ou conservateurs (sensibilisants) ;
– comment renforcer les moyens naturels de défense de la peau par des crèmes émollientes sur peau propre, éventuellement par crème barrière sur peau saine exclusivement ;
– les gestes nocifs à éviter,
– les gestes professionnels à encourager,
– l’intérêt des EPI (et leurs éventuels effets néfastes).

Atopie : quelle prise en charge ?

Delphine STAUMONT-SALLE, Praticien Hospitalier Universitaire, Service Dermatologie, CHRU-Université Lille

La dermatite atopique est une dermatose inflammatoire chronique fréquente, touchant 15 à 25% des salariés, ce qui en fait un réel problème de santé publique, d’autant que cette pathologie multiplie par trois le risque d’eczéma des mains chez le travailleur et que cet eczéma est plus sévère.

L’important est d’en faire le diagnostic clinique. L’affection se caractérise par un prurit associé à au moins trois des critères suivants : topographie des lésions (plis), antécédents personnels ou familiaux d’asthme et/ou de rhinite, sécheresse cutanée diffuse, début des signes cutanés avant l’âge de 2 ans.
Il s’agit d’une maladie multifactorielle : intrication de facteurs génétiques, environnementaux, immunitaires, associés à une altération de la barrière cutanée.
Deux aspects cliniques sont retrouvés, parfois intriqués :

la dermatite irritative (la plus fréquente), qui s’améliore à l’éviction de l’irritant mais qui peut perdurer en milieu domestique en présence d’autres irritants ;
l’eczéma de contact allergique caractérisé par le fait que l’individu se sensibilise spécifiquement à un allergène rencontré dans l’environnement (en raison de l’altération de la barrière cutanée et de la dysrégulation de la réponse immune locale). Les mains présentent le plus souvent un aspect sec, lichénifié et souvent fissuré mais il peut exister des vésicules et un prurit.
Il faut dès lors traiter : soins topiques associant souvent dermocorticoïdes et émollients, voire traitements systémiques ou immunosuppresseurs et proposer une déclaration de maladie professionnelle.
La prévention est essentielle : hygiène des mains, éviction des solvants, des savons détergents, des antiseptiques, séchage soigneux…, port de gants adaptés et renouvelés fréquemment, sous-gants en coton, éviction du latex, maintien des soins en dehors des périodes de travail.
Le recours à une consultation multidisciplinaire et à une éducation thérapeutique telle que celle dispensée par l’Ecole de la main est vivement souhaitable.

L’important est de sensibiliser le plus précocement possible le sujet atopique aux métiers à risque, afin d’aider au choix de son orientation professionnelle. Il faut informer très précocement les pré-apprentis, les apprentis et les parents, détecter les premiers symptômes et orienter rapidement les jeunes vers des spécialistes qui les aideront à guider leurs choix pour préserver leur santé.

L'Ecole de la Main

Martine VIGAN, Dermato-Allergologue, CHUR Besancon, GERDA

Trop de conseils sont prodigués aux patients, pour la plupart incomplets ou inapplicables dans le monde du travail.
Le salarié doit être instruit sur la physiopathologie de sa pathologie et doit recevoir des conseils qu’il pourra appliquer dans son activité professionnelle.
Il faut induire chez les salariés, des changement de pratique qui ne seront acceptés que si leur fondement est intégré.

Le programme de l’Ecole de la main tel que celui proposé au CHRU de Besançon a pour objectif l’acquisition de connaissances par le patient, au moyen de séances individuelles ou collectives au cours desquelles un programme de prise en charge adapté lui sera proposé qui sera fonction de son histoire, de ses pratiques professionnelles, de sa pathologie.

Une évaluation de ces pratiques faite sur 96 patients pris en charge en 2007 au CHRU de Besançon montre une bonne acquisition des connaissances pour 97% d’entre eux et un changement de pratiques pour 68% des cas. L’expérience allemande dans ce domaine est particulièrement concluante. Sur 1 617 patients suivis pendant 12 mois, plus de 87,4% d’entre eux ont pu être maintenus à leur poste de travail, tandis que les arrêts de travail ont diminué de 52%, que la consommation des corticoïdes a régressé et que les patients ont noté une importante amélioration de leur qualité de vie.

Devant ce réel problème de santé publique que constitue la pathologie chronique des mains en Europe, il est souhaitable que ces Ecoles de la main soient intégrées en prévention au cours de la scolarité, au moment de l’orientation professionnelle, pendant l’apprentissage et dans les suites immédiates des embauches à des postes à risque. 

Communications

Identification des situations d'exposition cutanée au bitume lors des travaux de revêtements routiers

Nathalie JUDON, INRS Lorraine, Dtp HT, Laboratoire EPAP

Un travail de collaboration entre l’INRS et différents partenaires sensibilisés aux expositions au bitume a eu pour objectif de construire un outil d’analyse des situations d’exposition cutanée au bitume et de comprendre la perception du risque par les opérateurs. La démarche ergonomique mise en œuvre basée sur l’analyse de l’activité a conduit à la construction d’une grille de caractérisation du contact cutané. Ensuite, des entretiens collectifs ont permis de comprendre la perception du risque par les intéressés. On note une méconnaissance du risque : le seul risque évoqué est la brûlure. Aucun salarié ne cite un contact direct avec le bitume. Les opérateurs font un amalgame entre un produit débituminant bio (respectueux de l’environnement) et son innocuité pour la santé. De même ils se fient à leur odorat (une odeur forte étant pour eux, un indicateur de dangerosité).
Il s’ensuit une protection insuffisante : les gants ne sont perçus que comme une parade contre la brûlure. De fait, 2/3 des opérateurs n’en portent pas (car gênant la dextérité, la sensibilité et tenant trop chaud). 

Chaussures de sécurité et kératolyse ponctuée

Isabelle LARTIGAU-SEZARY, Sce Dermatologie, CHRU Lille

Face à un salarié qui s’excuse d’avoir transpiré et d’avoir les pieds qui sentent mauvais, il faut lui demander d’enlever ses chaussettes et regarder de près les plantes des pieds et les espaces inter orteils. Sur les zones d’appui avant pied et talon, on découvrira de petits puits (« pits »), un aspect macéré, une couche cornée découpée en « cartes de géographie », mais pas de fissures (contrairement aux infections fongiques).
Cela suffit à faire le diagnostic de kératolyse ponctuée, engendrée par une corynébactérie (Corynebacterium keratoliticum) et dont le développement est favorisé par le confinement dans les chaussures qui sont portées tous les jours de la semaine et qui restent souvent humides.
Cette affection est facile à soigner : antibiothérapie locale biquotidienne (érythromycine ou acide fusidique), associée à une poudre imidazolée le matin et le tout pendant un mois. 

14h00 – 16h30

Présidence de Séance :
Jean-Philippe TOURNEMINE, Président GNMS BTP, Médecin du Travail, SAN T BTP
, Directeur technique OPPBTP Prévention collective

Hygiène sur les chantiers : reflets du terrain

Christophe GRUN, Ingénieur de Prévention, OPPBTP, Agence Ile de France - Grande Couronne

L’OPPBTP a comparé les résultats de l’enquête 2013 aux données recueillies en 2008.

Les bases–vie sont encore insuffisantes mais elles sont aujourd’hui mieux équipées

20% des chantiers n’ont toujours pas de base-vie,
aucun entretien n’est prévu pour 1/3 des bases vie installées,
uniquement 15% des chantiers intègrent la mixité dans les installations d’hygiène.
Mais aujourd’hui les bases vie disposent d’un meilleur équipement (en termes de WC, douches, vestiaires, équipements pour la restauration).
Point négatif : la présence d’un lot spécifique « bases-vie » dans le Plan Général de Coordination (PGC) recule de 13%.
L’hygiène sur les chantiers s’est globalement améliorée

Si les vêtements de travail sont fournis dans 85 % des cas,l’entretien reste encore à 80% à la charge des salariés.
Les salariés se soucient plus de leur hygiène alimentaire (ils étaient 60% à s’en désintéresser en 2008 contre 11% en 2013) ; les achats sur place pour le repas de midi ont diminué de moitié et l’utilisation des solvants pour se laver les mains ne représente plus que 1% des cas contre 7% en 2008.
Le transport et la circulation des personnes sur les chantiers n’ont guère progressé, voire se sont aggravés

Si le ramassage des salariés reste la solution majoritaire à 40%, 40% des entreprises n’organisent pas le transport de leur personnel sur chantier et 27% des chantiers ne mettent pas à disposition des salariés, des emplacements pour le stationnement de leur véhicule (cette opportunité a même diminué de 10%).
L’organisation des flux véhicules/piétons sur chantier est en chute de 13%, soit plus d’un chantier sur cinq.
Les résultats montrent de plus en plus de différences entre petits chantiers et grands chantiers.

Hygiène : contexte réglementaire propre au BTP

Bernard LANCERY, Bureau CT3 - Conditions de travail, de la santé, et de la sécurité au travail, Direction générale du Travail

Comportement face aux risques, hygiène des ouvriers du BTP : Approche sociologique

Etude menée par l’Ecole Centrale de Paris, avec le soutien du GNMSTBTP et l’OPPBTP Cynthia COLMELLERE, Enseignant chercheur, Département des Sciences Humaines, Ecole Centrale, Paris

Mesures d'hygiène : un avantage de performance pour l'entreprise BTP : Etude DIMECO

Paul DUPHIL, Secrétaire Général, OPPBTP

Risque chimique et substitution : quels outils pour les préventeurs ?

Mireille LOIZEAU, Dominique LEUXE, Toxicologues APST BTP RP, Bourg la Reine   Dominique PAYEN, Responsable de domaine, Direction technique, OPPBTP

Des ressources documentaires pour les préventeurs

Les ressources du GNMST - BTP et de l'OPPBTP

Caroline MANET, Médecin du travail, SST BTP de Franche-Comté, GNMST BTP Marc SOLER, Chef d'Agence, OPPBTP Nord Est

Le site de l’OPPBTP : www.preventionbtp.fr
On y trouve quantité de renseignements : dossiers, fiches et affiches de prévention, guides, solutions techniques de terrain, références juridiques…
Dossiers abordant une multitude de thèmes (économie de la prévention, dangers, risques, nuisances), de nombreuses situations de travail, et offrant une foule de renseignements sur un grand nombre de métiers du bâtiment. Un accès par moteur à facettes rend la recherche très aisée.
Il reflète une production active et il est enrichi régulièrement (98 parutions en 2012).
Ce site prévention BTP reçoit 40 000 visites par mois, 500 000 pages sont vues mensuellement ; les internautes restent connectés en moyenne 6 minutes et 4 500 fiches prévention sont téléchargées. La création d’un document unique (DU) est possible (1 500 DU créés ou modifiés par mois). 

Les sites du GNMST BTP : www.gnmstbtp.org et www.forsapre.fr

On y trouvera :
– les fiches FAST (fiches actualisées des situations de travail),
– les fiches FAN (fichier actualisé de nuisances),
– FORSAPRE qui reprend les éléments du FAST et du FAN pour les intégrer dans un outil informatique plus général,
– des fiches EPI,
– des fiches de métrologie,
– des fiches santé,
– des informations relatives à l’étiquetage. 

Les outils de l’INRS : les fiches d’allergologie professionnelle, la base de données Maladies Professionnelles, l’Atlas de dermatologie
Geneviève ABADIA, Responsable Département Etudes et Assistances Médicales, INRS – Anne DELEPINE, Conseiller en santé au travail, Dpt Etudes et Assistances Médicales 

INRS – Diaporama
– les fiches d’allergologie professionnelle (FAP) publiées dans la revue Références en santé au travail (RST) et disponibles gratuitement et téléchargeables en totalité sur le site http://www.rst-sante-travail.fr, rubrique fiches thématiques ou outils repères, ou encore via le site de l’INRS ;
– la base maladies professionnelles interrogeable par maladie, activité, nuisance avec tableaux accompagnés de commentaires, sur le site www.inrs-mp.fr
– l’atlas de dermatologie professionnelle hébergé par l’INRS depuis 2009 constitue une aide pour les médecins du travail, médecins traitants et dermatologues pour le diagnostic positif, le diagnostic différentiel et le diagnostic étiologique. 

16 h 30

Synthèse des Séances

Paul FRIMAT

Le Professeur FRIMAT a conclu ces journées dans ces termes :
Ce thème constituait un véritable enjeu pour la profession et pour l’Entreprise.
Il ne se résumait pas à une seule pathologie mais était l’occasion de regards croisés entre différents acteurs de la santé (santé au travail et santé publique).
Ces journées n’étaient pas une simple revisite des classiques mais l’occasion d’évoquer la véritable problématique des dermatoses des travailleurs du BTP eu égard au poids de leur conséquences humaines et professionnelles. 

16 h 45

CLOTURE DU CONGRES

Paul FRIMAT

Présentation des 33èmes Journées Nationales de Santé au Travail dans le BTP – Limoges, mai 2015

MEMBRES DU CONSEIL SCIENTIFIQUE

P. FRIMAT, MB. CLEENWERCK, JM. BRILLET, JP. BAUD, D. LEUXE, P. RICHARD, J. BINO, M. SOLER, C. MOREL, C. NISSE, B. KLODZINSKI, G. ARASKIEWIRZ, C. LEBAUPAIN, M. TONNEAU, J. DEQUIRET, S. VANDENBUSSCHE, C. CROGUENNOC, S. FANTONI, JP TOURNEMINE, MN CREPY

REMERCIEMENTS

A toutes les personnes ayant participé à l’organisation.

Aux participants, qui ont accepté la mise en ligne de leur présentation

Mis à jour le 26/06/2015